et l'action de sauvegarde engagée par la LPO |
« Début
mars une brise de sud-ouest souffle sur l'Anjou. Le ciel est
encore chargé mais le gros des averses est
passé. Depuis des semaines, la pluie n'a cessé
de tomber, gonflant les rivières qui n'ont pas
tardé à inonder les prairies dans les Basses
Vallées Angevines. |
Les Basses Vallées Angevines (BVA) |
L'appellation « Basses Vallées Angevines
» désigne les vastes
étendues inondables situées au nord et
au sud immédiat d'Angers, traversées par trois
rivières - Mayenne, Sarthe et Loir -, qui forme la
Maine avant de se jeter dans la Loire.
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Les Basses Vallées Angevines sont
constituées essentiellement de
prairies naturelles
exploitées traditionnellement pour le foin et le
pâturage tardif, créant un paysage
varié, prairies ouvertes sur de vastes superficies,
bocage à Frênes par endroits parsemé de
saules et de peupleraies. La présence d'un habitat
prairial, de fossés, de bras morts, de mares et de
haies est à l'origine d'une
grande diversité
d'espèces animales et
végétales. |
Des crues indispensables à l'écosystème du site |
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Les Basses Vallées Angevines constituent le plus vaste système de confluence du bassin de la Loire. |
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C'est là, à l'entrée du Massif
Armoricain, que convergent les trois grands affluents du
nord de la Loire, greffant sur le fleuve un cinquième
de son bassin versant, par un pédoncule de 12 km : la
Maine. |
Les paysages des BVA |
Le paysage des Basses Vallées Angevines est
original à plus d'un
titre. Il se compose : |
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Un milieu naturel remarquablement riche... |
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... mais menacé |
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La situation climatique et géographique exceptionnelle de ce site offre un patrimoine naturel remarquable tant au niveau de la faune que de la flore. L'accueil de certaines espèces menacées et la présence d'une flore riche justifient la protection des Basses Vallées Angevines. La faune Le lit majeur des cours d'eau est rapidement recouvert lors des crues hivernales et printanières. Les prairies inondées constituent alors une escale de choix pour les oiseaux migrateurs et parfois une zone de repli lors des vagues de froid. À la remontée, les oies s'y posent dès la mi-février, et, pour peu qu'aucun dérangement ne survienne, elles peuvent y stationner plusieurs jours. Le Canard pilet, le Canard siffleur et le Fuligule milouin sont les canards les plus caractéristiques et les plus nombreux en fin d'hiver. |
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Ces zones humides constituent en particulier un site de première importance pour les haltes migratoires des Barges à queue noire. Parties de leurs quartiers d'hiver ouest-africains, et regagnant le Nord de l'Europe, la Hollande principalement mais aussi l'Islande (voir données de baguage), 15 000 à 30 000 d'entre elles (19 000-25 000 le 7·3·04 p. ex.), soit 15 % de la population européenne, transitent chaque printemps par les Basses Vallées Angevines. Citons parmi les autres espèces migratrices : le Vanneau huppé, le Pluvier doré, le Combattant varié, les chevaliers et bécassines, la Mouette rieuse... |
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Quelques courbes de passage (cliquer sur nom ou graphe pour agrandir ce dernier) : | |||||||||||
![]() Canard siffleur |
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Plus tard en saison, les Basses Vallées Angevines vont héberger une avifaune nicheuse remarquable. Il convient de mentionner le Tarier des prés, le Bruant des roseaux et le Bruant proyer, la Bergeronnette printanière, le Phragmite des joncs et, avec des effectifs moindres, le Vanneau huppé et la Caille des blés. Les fossés et zones inondées en fin de printemps accueillent deux autres espèces moins communes : la Sarcelle d'été et la Marouette ponctuée. Constituée d'espèces migratrices souvent très spécialisées, cette avifaune a de faibles capacités d'adaptation face aux modifications de son habitat et est, par conséquent, partout en voie de raréfaction. |
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Les Basses Vallées Angevines accueillent aussi une espèce mondialement menacée, le Râle des genêts. C'est lune des principales zones de nidification en Europe. Les 330 couples recensés en 1994 représentent près du tiers de la population française (1 100 couples) sur un total de 2 000 en Europe communautaire. Or l'abandon progressif de l'activité agricole (déprise) et notamment de la fauche en fin de printemps et sa substitution par la plantation diffuse de peupliers menaçaient les habitats favoris de cette espèce. C'est pourquoi l'Union européenne a accordé son soutien financier à travers une action communautaire pour la nature ou LIFE, en vue de restaurer les habitats favorables au Râle des genêts dès 1991. |
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La flore |
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Les relevés floristiques réalisés ces dernières années dans le cadre du volet « études » du programme communautaire, ont souligné l'intérêt botanique majeur des Basses Vallées Angevines, tant au plan national qu'européen. De tels exemples de prairies naturelles inondables couvrant d'aussi grandes superficies sont de plus en plus rares. Parmi les 250 espèces prairiales observées, une trentaine d'espèces remarquables présentent un réel intérêt patrimonial. Plusieurs sont protégées au niveau national ou régional, notamment la Gratiole officinale, l'Inule d'Angleterre, la Stellaire des marais et la Cardamine à petites fleurs. |
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La plus spectaculaire reste cependant la Fritillaire pintade, appelée localement « gogane », « coquelourde » ou « chaudron ». Les prairies des Basses Vallées Angevines possèdent deux principaux groupements végétaux remarquables : le groupement à Gratiole officinale et nanthe fistuleuse dans les secteurs les plus bas et le groupement à Séneçon aquatique et nanthe à feuilles de silaus un peu plus haut. |
La répartition géographique de ces groupements dépend avant tout de la durée de submersion par les crues, la superposition des cartes de champs d'inondation et de la localisation des groupements végétaux, issue des études hydrauliques et botaniques, le confirme. L'exploitation dominante par fauche, suivie ou non d'un pâturage du regain, participe également à la préservation de ce patrimoine botanique d'exception. |
Les activités agricoles et touristiques |
L'agriculture est l'élément qui au fil
des siècles a créé ce paysage ouvert
sur de vastes superficies. Les pratiques agricoles
ancestrales, ici fauche après la mi-juin et
pâturage en commun du regain, ont maintenu un
milieu prairial à
l'exceptionnelle richesse et motivé les
agriculteurs et les communes qui restent très
attachés au site. La populiculture est un
phénomène récent, remontant aux
années soixante-dix. La déprise agricole, le
prix du foncier peu élevé et des avantages
financiers et fiscaux ont parfois incité à
planter des peupliers sur de vastes superficies, modifiant
le paysage ainsi que l'intérêt tant faunistique
que floristique du site. Les zones de frayères
notamment pour les brochets et l'intérêt
cynégétique de ces vallées ont
largement contribué aussi à la renommée
du site. |
Une action communautaire de protection de l'environnement |
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Pour préserver le site des Basses vallées Angevines, la Ligue pour la Protection des Oiseaux a lancé un programme d'actions communautaires pour l'environnement (ACE) en 1991, qui a reçu le concours financier de la Communauté européenne, du ministère de l'environnement, de la région des Pays-de-la-Loire, du département de Maine-et-Loire, du Conservatoire des rives de la Loire et de ses affluents et de l'agence de l'eau Loire-Bretagne. Ce programme, en complément d'une phase d'études inédites et d'évaluation de la valeur biologique des prairies inondables (faune et flore), vise d'abord à faire prendre conscience de l'importance écologique des Basses Vallées Angevines et des transformations irréversibles vers lesquelles elles pouvaient évoluer. Il a permis aussi, par des acquisitions et conventions de gestion, de soustraire les prairies situées dans les zones biologiques les plus riches à toute déprise agricole ou plantation de peupliers. À ce jour, la LPO est propriétaire de plus de 330 hectares répartis sur les secteurs clés et bien représentatifs du patrimoine botanique mis en évidence par les études menées dans les Basses Vallées Angevines. Ces parcelles sont louées aux agriculteurs locaux. Pour y maintenir des pratiques respectueuses du milieu naturel, quelque 135 hectares font l'objet de conventions particulières avec des exploitants qui n'autorisent les fauches qu'après le 25 juillet. Elles permettent ainsi le respect de l'avifaune nicheuse et notamment du Râle des genêts qui peut ainsi mener à bien sa première nichée et en refaire une deuxième. Le Râle des genêts n'est désormais plus l'oiseau mythique du site, il en est devenu un des éléments majeurs, valorisant tant les communes que le paysage. La LPO a largement contribué à informer et sensibiliser le grand public et les scolaires à la nécessité de préserver ce site. Grâce à cette action, les Basses Vallées Angevines sont aujourd'hui reconnues et prises en compte dans les politiques d'aménagement du territoire engagées par les élus locaux. La démarche engagée dès 1990 par la LPO auprès des administrations a permis dans le même temps la mise en place d'une mesure agri-environnementale appelée OGAF-Environnement (opération groupée d'aménagement foncier) qui n'aurait pu aboutir sans le soutien actif de la Direction régionale de l'environnement Pays-de-la-Loire, la Direction départementale de l'agriculture et de la forêt et de la Chambre d'agriculture de Maine-et-Loire. Elle s'adresse aux exploitants, leur propose un cahier des charges respectueux du milieu et leur permet d'avoir droit à une compensation financière, plus ou moins élevée selon le niveau de contraintes imposées, en provenance de l'Union européenne (fonds agricole), de l'État français et du conseil général. En 1998, quelques 2 800 hectares font ainsi l'objet d'un contrat, ce qui a permis d'enrayer nettement la déprise agricole. Cette mesure initialement engagée en 1993 pour une période de 5 ans à été reconduite en 1998 (jusqu'en 2002) grâce aux résultats encourageants obtenus notamment en ce qui concerne le Râle des Genêts avec une augmentation du nombre de mâles chanteurs de 330 en 1994 à 470 en 1997. plaquette Pelouses et prairies naturelles (8 pages A5) plaquette les Prairies des Basses Vallées Angevines,
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Le Râle des genêts : les nichées préservées des faucheuses. Dès 1994, dans le cadre d'un programme européen d'action en faveur du Râle des genêts, la LPO, avec l'aide des agriculteurs, met en place une fauche respectueuse des oiseaux nicheurs. Cette « fauche sympa » qui part du centre de la parcelle vers l'extérieur, permet aux familles de Râles des genêts de fuir devant les faucheuses vers des zones refuges. Les suivis mis en place sur les Basses Vallées Angevines ont permis de sensibiliser tes agriculteurs et de garantir la survie d'un grand nombre de poussins. |
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Dans le même temps, un zonage des boisements
était réalisé afin de répondre
au souci de préserver les grands ensembles
homogènes des Basses Vallées Angevines. En
n'autorisant les plantations de peupliers que dans certains
secteurs, cette réglementation des boisements est une
première en France. La France a par ailleurs
désigné site RAMSAR en 1995 les Basses
Vallées Angevines au titre de la convention
internationale sur la protection des zones humides. |
Ce programme a
bénéficié du concours financier :
de l'Union européenne,
du ministère de l'environnement,
de la région des Pays-de-la-Loire,
du Conservatoire régional des rives de la Loire,
du conseil général de Maine-et-Loire,
de l'agence de l'eau Loire-Bretagne,
du WWF,
et des donateurs de la LPO.